01/08/24
Par Clélie de Lesquen-Jonas

Production en justice d’un enregistrement secret réalisé à l’insu de l’employeur 

Dans un arrêt rendu le 6 juin 2024 (Cass., 2ème civ., 6 juin 2024, n° 22-11.736, publié au bulletin et publié au rapport), la Cour de cassation a jugé qu’un salarié peut à certaines conditions produire en justice un enregistrement réalisé à l’insu de son employeur afin de faire reconnaître le caractère professionnel de l’accident et la faute inexcusable de l’employeur.

Ainsi, selon la Cour de cassation, la production de cette preuve était indispensable à l’exercice par la victime de son droit à voir reconnaître tant le caractère professionnel de l’accident résultant de cette altercation que la faute inexcusable de son employeur à l’origine de celle-ci, jugeant que l’atteinte portée à la vie privée du dirigeant de la société employeur était strictement proportionnée au but poursuivi, à savoir celui d’établir la réalité des violences subies par la victime et contestées par l’employeur.

Dans cette affaire, la Cour a rappelé qu’aucun témoignage ne pouvait être recueilli en raison du lien de subordination entre des potentiels témoins et l’employeur.

Ce nouvel arrêt, s’inscrit dans la lignée de la décision de l’Assemblée plénière de la Cour de cassation du 22 décembre 2023 (Cass., Ass. plén., 22 décembre 2023, n° 20-20.648, publié au bulletin et publié au rapport) aux termes duquel la haute juridiction a jugé que « dans un procès civil, le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une preuve obtenue ou produite de manière illicite ou déloyale, porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi », ainsi que de la décision de la chambre sociale de la Cour de cassation du 17 janvier 2024 qui précise que « Dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats » (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-17.474)